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" Un appartement baigné d’une dense lumière jaune telle une photographie sépia, un fauteuil matelassé de velours vert dans un coin de la pièce, une lampe Tiffany suspendue au plafond, un chemisier en dentelle noire qu’on croirait oublié dans un placard à la porte entrouverte, des roses fanées dispersées… Léah Friedman a l’art de mettre en récit les espaces qu’elle investit.

 

Artiste, curatrice, médiatrice, conteuse, scénographe… elle multiplie les rôles et brouille les frontières entre exposition et scène de théâtre afin de nous plonger dans ses histoires immersives. 

Après un passage à l’école des Gobelins où elle se forme au cinéma d’animation, elle valide une licence d’arts plastiques avant de partir étudier la scénographie au Pavillon Bosio. Sa formation initiale fait du dessin un de ses médiums de prédilection. Par l’usage de la ligne claire, exécutée rapidement, elle donne vie aux personnages en mouvement, comme capturés sur le vif.  

Pour l'exposition Le Lièvre, Mouchi et la Gattora, Léah Friedman s’empare de l’histoire du triangle amoureux formé par les artistes surréalistes André Pieyre de Mandiargues, Leonor Fini et Stanislao Lepri à Monaco à partir des années 1940. Ses dessins de corps et d’êtres hybrides, peints sur le mur et inspirés de l’iconographie des trois artistes, nourrissent sa narration au fur et à mesure de notre déambulation. Prenant leur passion pour sujet, elle se saisit de la charge émotionnelle résiduelle des lieux et met en scène l’intimité du trio dans un appartement transformé en espace d’exposition. Celui-ci, comme hanté par leurs fantômes, invite les spectateur·rice·s à expérimenter physiquement ce récit, jouant entre fiction et réalité. Les objets qui s’y trouvent, chinés ou bien créés par l’artiste, portent les traces du passé : trônant au milieu de la chambre, son paravent-cimaise en tissu et métal se couvre d’une rouille orangée, comme oublié depuis de nombreuses années par ses anciens propriétaires.  

Cette mise en récit est une constante dans son travail, qu’elle expérimente par le biais d’expositions collectives. Dans Henriette (mars 2022, Villa Henry, Nice), Léah Friedman donne vie à la maison qui les accueille pour le projet.  Celle-ci devient une entité à part entière et prend la forme d’Henriette, personnage féminin fictionnel qui y aurait vécu. Elle entrelace œuvres, archives du lieu, mobilier et discours, chacun faisant sens par écho aux autres, devenant les souvenirs de cette héroïne.

 

Le Chemin des cendres (septembre 2022, Pavillon Bosio) illustre également cette pratique du lieu comme support de la mémoire. L’exposition collective se compose des traces et résidus des performances qui s’y sont déroulées. Évacué de toute présence humaine, abandonné, l’espace est envahi par une végétation courant jusqu’au plafond, semblable à une ruine dans laquelle la nature reprend ses droits. 

Par son exploration de la mémoire et de l'interaction entre corps réels et corps fictifs, l'artiste suscite une résonance intime et engageante chez les spectateur·rice·s. Léah Friedman nous invite à plonger dans un monde où la narration devient une expérience en soi, nous laissant captivé·e·s par les multiples facettes de son travail artistique. "

 

- Pauline Schweitzer, critique spécialisée en art contemporain, co-fondatrice du collectif "Jeunes Critiques d'Art".

© 2023 par Léah Friedman.

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